Au fil de l’histoire – Des lieux, des gens
Rédaction Marie Josée Bourgeois
Collaboration à la recherche Marthe Lemery
19 juin 2024
Orpheline de père à 6 ans, Paulette Ménard a suivi l’exemple de sa mère Geneviève Major qui n’a jamais baissé les bras devant l’ampleur de la tâche après le décès de son mari, Maurice Ménard (1901-1947). Il y avait une terre à gérer sur le rang Saint-Louis à Saint-André-Avellin et huit enfants à élever, dont un bambin de trois ans. « Ma mère s’est tenue debout pour nous avec un sourire aux lèvres. Elle nous a inculqué la sérénité dans l’épreuve » ajoute cette politicienne de Plaisance. « J’ai toujours eu une pensée particulière pour toutes ces femmes qui ont bâti le Québec et qui nous ont donné des exemples de fierté. »
Illustration 38 – Une jeune Paulette rayonnante le jour de ses noces. Archives familiales
En septembre 1965, Paulette Ménard a épousé Francois Lalande (1939-2014), un ingénieur en devenir, alors qu’elle enseigne déjà depuis quelques années à Dorval. Cette ville, à l’époque, donnait le meilleur salaire aux femmes enseignantes – plus de 3 000 $ en 1960! – et c’est suite à la recommandation de son professeur à l’École normale de Saint-André-Avellin, qu’elle a fréquentée de 1958 à 1960, qui la tenait en haute estime, qu’elle a décroché cet emploi.
Francois n’était pas sans connaître la femme de cœur et l’agente de changement qu’était Paulette, passionnée de justice et alliée des causes à défendre. Il ne sera pas surpris de la voir mettre à profit ses talents de communicatrice et faire son chemin vers la politique municipale alors que le couple prend racine à Plaisance en 2001. Grand amateur de chasse, de pêche, de golf et lecteur assidu, Francois s’accommodera facilement de ses absences et l’appuiera dans sa passion. Tout comme ses filles d’ailleurs, devenues l’une ingénieure et l’autre avocate. Elle avoue facilement qu’elle n’était pas faite pour la vie domestique.
Illustration 39 – Comme sa mère, Paulette a toujours su affronter toutes les situations avec le sourire.Photo prise en 1967, archives familiales.
Parlons donc de cette politicienne de carrière, plus connue sous le nom de Paulette Lalande, qui, après 35 années dans l’enseignement, s’imposa sur notre scène politique régionale en accumulant les premières. Première femme à avoir été élue à une mairie de la Petite-Nation, Paulette a été mairesse de Plaisance pendant 20 ans. Première femme choisie par ses pairs en tant que préfète de la Municipalité régionale de Papineau, elle aura dirigé les destinées de l’organisme pendant 15 ans, jusqu’à son départ, en 2017.
Même si elle connaissait très bien son français, Paulette a longuement reculé devant la féminisation des titres; elle préférait de loin les titres de maire et de préfet. Par contre, elle a accepté sans aucune réticence le titre de présidente! Elle fut la première femme présidente du Réseau Biblio Outaouais et l’unique présidente de la Conférence régionale des élus de l’Outaouais (CREO).
Le CREO est disparu après seulement 10 années d’existence, dirigé par un président d’abord et Paulette ensuite. Celle-ci a manifesté contre son abolition sur toutes les tribunes possibles et encore aujourd’hui, elle trouve que « le gouvernement a fait fausse route. Ces échanges de connaissances entre élus de l’Outaouais étaient bénéfiques à tous points de vue. » Qu’importe, elle dira sans cesse « J’ai adoré faire de la politique sous toutes ses formes. J’ai aimé travailler avec les gens et j’ai toujours été très positive. »
Difficile pour l’entourage d’ignorer cette femme d’exception! Par son implication et son ardeur à défendre ses dossiers, en particulier ceux de la ruralité, Paulette a réussi à se faire remarquer des instances gouvernementales à tel point qu’on la surnommait affectueusement la première ministre de la Petite-Nation. « Mme Lalande a le territoire tatoué sur le cœur », affirme le préfet de la MRC de Papineau, Benoit Lauzon.
En 2019, elle s’est vue remettre la médaille de l’Assemblée nationale du Québec ainsi que la médaille Gérard-Lesage en 2020, attribuée par l’Université du Québec en Outaouais à des personnes de la collectivité qui laissent leur marque dans le développement et le rayonnement de notre région. En 2021, une salle du siège de la MRC a été nommée en son nom, pour immortaliser sa contribution.
Illustration 40 – La MRC a rendu hommage à une femme d’exception en baptisant l’une des salles de son siège administratif à son nom. Photo Étienne Ranger, Le Droit, 2021.
Paulette a profondément marqué les esprits avec un style de gouvernance empreint d’audace, de franc-parler, d’humilité et d’une empathie réelle. « C’est quelque chose que j’ai toujours retenu : ne pas avoir peur. Il faut se tenir debout et dire ce qu’on veut, mais toujours le faire dans le respect… Le respect des autres et le respect de soi, aussi.[1] »
Plus récemment, Paulette s’occupe de santé et de bien-être pour elle et pour les autres. Selon son habitude, elle n’hésite pas à en parler ouvertement. « Si vous mettez en doute vos habiletés cognitives, n’hésitez surtout pas à consulter en santé et en parler avec vos proches. Un dépistage précoce peut faire toute la différence pour retarder la dégénérescence des fonctions cognitives. Je l’ai bien fait moi! ». Si elle en parle, c’est dans le but d’aider les autres. C’est bien là, la Paulette que l’on connaît!
[1] https://ici.radio-canada.ca/ohdio/premiere/emissions/les-malins/segments/entrevue/355531/grande-entrevue-malins-paulette-lalande, consulté en ligne le 11 juin 2024.